Mis en ligne le 16 Mai 2012 et modifié le 11 Avril 2013
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Résumé du rapport de la Haute Autorité de Santé (HAS) de mars 2012, écrit par GCS EPSILIM (Groupement de coopération sanitaire expertise, performance et systèmes d’information en Limousin) et téléchargeable sur www.has-sante.fr

Texte écrit par Ségolène-Arzalier

Introduction

La HAS a défini l’amélioration de la sécurité du patient au bloc opératoire comme étant l’un de ses objectifs prioritaires. La check-list (CL) a été instaurée dans ce but, son efficacité à réduire les complications péri-opératoires ayant été rapportée dans la littérature [1]. Dans une dynamique d’amélioration continue de la qualité des soins, la HAS a souhaité évaluer sur le terrain l’implantation et l’utilisation de la CL, quelques mois après sa généralisation dans le cadre de la certification des établissements de santé.

Méthodes

L’étude réalisée d’octobre 2010 à juillet 2011 en partenariat avec une structure régionale d’appui aux établissements de santé (GCS EPSILIM) a sollicité treize établissements de la Région Limousin.

Elle s’est déroulée en 3 phases :

-une enquête « établissement » déclarative réalisée à l’aide d’un questionnaire collectif destiné au conseil de bloc. Le but de cette phase était d’évaluer le contexte institutionnel, l’utilisation et la perception collective de la CL.

-des questionnaires individuels sur la perception et l’implication des professionnels.

-une observation des pratiques sur site ainsi que des entretiens avec les acteurs du bloc opératoire. Cette partie permettait de compléter les deux phases précédentes, afin de ne pas méconnaître des dysfonctionnements non mis en évidence par les questionnaires. Elle évaluait de plus l’observance des bonnes pratiques, le remplissage de la CL et son mode d’archivage.

Les questionnaires utilisés ainsi que les guides d’observation et d’entretien sont disponibles dans les annexes du rapport.

Résultats

La phase 1 a mis en évidence le rôle prépondérant du conseil de bloc et de la CME dans l’information du personnel lors de réunions, la communication à l’ensemble de l’établissement n’ayant été réalisée que dans 55% des sites. Bien que le mode d’emploi de l’HAS ait paru suffisant, certains critères de la CL ont été jugés difficiles à remplir ou à comprendre (comme par exemple le signalement des dysfonctionnements) ou inadapté (antibioprophylaxie dans le temps 2 et non dans le temps 1). La CL a aussi été complétée dans certains établissements par des documents « maison » ou par de nouveaux critères (côté du patient). Les réponses sur l’utilité de la CL étaient unanimes et plus de la moitié des établissements ont déclaré avoir évité une erreur ou détecté un dysfonctionnement grâce à elle (erreur d’identité, inversion de dossier ou absence d’examens radiologiques). L’imminence de la certification a souvent été le moteur de l’évaluation de la mise en œuvre de la CL au sein des établissements.

La phase 2 a impliqué 169 professionnels (46% du corps médical, 54% du corps paramédical). L’utilité et l’efficacité de la CL n’ont pas été remises en cause, même lorsque l’intervention était rodée ou l’équipe stable, mais les avis sont restés mitigés sur le renforcement des liens entres les professionnels de l’équipe. Le coordonnateur, la plupart du temps un personnel infirmier, ne ressentait pas toujours le soutien du corps médical et trouvait difficile d’échanger oralement sur les items, que ne facilitait pas une certaine « théâtralisation » due à la verbalisation. Les professionnels regrettaient le manque de clarté dans la formulation des questions et trouvaient qu’elles ne répondaient pas complètement aux problématiques du bloc opératoire.

La version de la CL utilisée lors de la phase 3 était la V2010-01, sur support papier principalement, et archivée dans le dossier patient sauf pour un établissement qui sauvegardait la CL informatisée dans le logiciel de bloc. Il est ressorti de cette phase que les questions n’étaient pas intégralement formulées en équipe et que le temps de pause n’était pas toujours respecté, notamment avant l’induction anesthésique. Tous les intervenants n’étaient pas présents aux trois temps requis. Les entretiens ont confirmé qu’il restait des efforts à faire sur la communication orale, d’autant plus que les différentes catégories professionnelles n’avaient pas les mêmes problématiques. Dans la moitié des établissements l’ensemble des items était coché « oui » sans que se fasse toujours une réelle vérification croisée des informations aux temps prévus. L’identité, l’intervention et le côté étaient les principales préoccupations des professionnels. Certains items étaient peu verbalisés tels que la présence de la documentation, le mode d’installation et la vérification du matériel chirurgical. Le risque allergique, le risque d’inhalation ou d’intubation et le risque de saignement n’étaient abordés en équipe que dans 25 à 30% des cas. La réalisation de l’antibioprophylaxie était verbalisée dans 50% des cas et les prescriptions post-opératoires faisaient l’objet d’un consensus entre chirurgien et anesthésiste dans 38% des cas.

Discussion

Cette évaluation auprès des établissements et des professionnels a permis de faire le point sur l’emploi et les difficultés d’application de la CL. Il ressort que « l’information délivrée en amont n’est pas optimale pour assurer une utilisation performante ». La CL est globalement acceptée, les professionnels y portent un réel intérêt témoignant d’une implication et d’une dynamique vers l’instauration d’une culture de sécurité. Elle n’est pas considérée comme une perte de temps ou une remise en cause des compétences professionnelles. Il reste à améliorer le partage des informations et la vérification croisée des points critiques, véritable « clé de voûte de l’utilisation de la CL », mais le manque de cohésion au sein des équipes rend la tâche de coordinateur difficile. Beaucoup considèrent la CL comme une formalité administrative supplémentaire non intégrée à la pratique professionnelle, pouvant doubler les documents réglementaires existants. De ce fait elle n’est pas encore généralisée à toutes les interventions, d’autant plus qu’elle est considérée comme inadaptée aux gestes rapides ou sous anesthésie locale et trop lourde pour les urgences vraies. Pour beaucoup, « la simplification de la CL serait nécessaire en réfléchissant à sa complémentarité avec les fiches de liaison existantes ». Enfin, elle représente le contrôle ultime avant l’intervention chirurgicale, et doit entrer dans un processus global de sécurisation de la prise en charge. La vigilance doit être présente à toutes les étapes du processus de soin, la CL n’étant finalement que la dernière barrière d’une prise en charge pré-opératoire axée sur la sécurité du patient.

Conclusion

L’utilité de la CL n’est plus à discuter dans la prévention des accidents péri-opératoires. Elle s’inscrit parfaitement dans la démarche de réduction du risque entreprise par notre discipline depuis quelques années. Malgré cette prise de conscience, son appropriation par les professionnels n’est pas totale et certains aménagements seraient nécessaires afin de permettre une meilleure adhésion du corps médical et paramédical. Il faut de plus garder à l’esprit que la prise en charge du patient chirurgical ne se limite pas à la salle d’intervention mais relève d’une médecine péri-opératoire globale à laquelle, comme le suggère la littérature [2], il faudrait appliquer la même rigueur que celle exigée par la CL au bloc opératoire.