Le tramadol et la codéine sont des analgésiques opioïdes largement utilisés pour soulager la douleur modérée à sévère. Cependant, leur utilisation est associée à des risques de mésusage, d’abus et de dépendance. On peut identifier plusieurs facteurs de risque qui doivent être connus des praticiens :
  • Facteurs individuels : Antécédents de troubles psychiatriques, de dépendance à d’autres substances, personnalité impulsive, douleur chronique intense.
  • Facteurs liés au traitement : Durée du traitement, doses élevées, association avec d’autres médicaments sédatifs, accès facile au médicament.
  • Facteurs socio-environnementaux : Disponibilité du médicament, pression sociale, facteurs socio-économiques.
Ces mésusages sont associés à une morbi-mortalité non négligeable. Ainsi, l’enquête annuelle nationale d’addictovigilance du tramadol, a mis en évidence une augmentation régulière des usages problématiques de cette substance, associée à une morbidité et une mortalité. Il est l’antalgique opioïde le plus consommé (forts et faibles confondus) avec une augmentation de plus de 68 % entre 2006 et 2017*. Le tramadol est le premier antalgique opioïde rapporté dans les notifications d’usage problématique du réseau national d’addictovigilance, le premier également impliqué dans les décès de l’enquête Décès Toxiques par Antalgiques.
Il faut aussi rappeler que bien qu’appelé “opioïde faible” le tramadol est un morphinique puissant. À titre d’exemple 400 mg de tramadol/jour = 80 mg de morphine/jour.
Les stratégies de prévention sont donc nécessaires.
  • Information des professionnels de santé : Formation des médecins et des pharmaciens sur les risques liés au tramadol et à la codéine, les bonnes pratiques de prescription et la détection précoce des signes de surdosage.
  • Information des patients : Fournir aux patients des informations claires et complètes sur les risques liés à la prise de tramadol et de codéine, et souligner les alternatives pour la prise en charge de la douleur.
En résumé, le mésusage du tramadol et de la codéine représente un problème de santé publique important. C’est pour cela qu’à partir du 1er décembre 2024, la prescription des médicaments contenant du tramadol ou de la codéine, devra se faire uniquement sur une ordonnance sécurisée. Cette décision a été prise pour mieux encadrer l’usage de ces substances, qui présentent des risques importants de mésusage, de dépendance et de surdosage. De plus, la durée maximale de prescription de la codéine est réduite à 12 semaines, alignée sur celle du tramadol. Au-delà de cette période, une nouvelle ordonnance sécurisée sera nécessaire.
Ces mesures visent à limiter les abus et à réduire les cas d’ordonnances falsifiées. Les professionnels de santé sont également invités à prescrire ces médicaments pour des durées courtes, en particulier pour les douleurs aiguës, et à réévaluer les traitements tous les trois mois dans le cadre des douleurs chroniques. Des mentions d’alerte devraient également être ajoutées sur les boîtes de médicaments à l’avenir.
Ces modifications doivent permettre une meilleure prise en charge analgésique des patients en sécurisant les prescriptions et en instaurant des réévaluations nécessaires. Chaque prescripteur doit savoir se poser la question de la nécessité d’une prescription d’opioïdes chez un patient qui ne peut être une prescription automatique.
A titre d’exemple, une enquête récente de l‘OMEDIT Bretagne montre que parmi les patients à qui sont prescrits des opiacés à la sortie de l’hôpital après chirurgie, 56% ne sont pas douloureux le jour de la sortie et n’ont pas consommé d’opiacés lors de leur séjour.
* source ANSM