Georges François
26 septembre 1932 – 26 avril 2025
Le Professeur Georges François nous a quitté le 26 avril 2025 à l’âge de 92 ans. Georges François avait une formation de cardiologue mais avait été nommé Professeur et chef du département d’anesthésie-réanimation de l’hôpital de la Timone en août 1968, à une époque où l’anesthésie et la réanimation étaient des spécialités en devenir dans lesquelles il y avait tout à construire. Il a donc participé à cette construction et a eu d’innombrables élèves et pour n’en citer que quelques-uns, François Gouin, Claude Granthil, Claude Martin, Jean-Pierre Auffray, Jean Camboulives, les signataires de cette page ainsi que Jean-Louis Blache chef de service du centre anti-cancéreux de Marseille.
Il avait une âme de constructeur et d’organisateur. Très tôt, il a organisé les réanimations sur le fonctionnement actuel avec 30 ans d’avance. Il a organisé les soins avec des référents infirmiers, organisé des réunions hebdomadaires sur les questions techniques, des réunions avec les bactériologistes, bref une vie de service organisée. Malgré les internes rétifs, il avait organisé les soins autour de protocoles, là encore en avance sur son temps. Avec ses complices du CNU, le Professeur Jean-Marie Desmont et la Professeure Marie-Claire Laxenaire, il est clair qu’il a fait partie des visionnaires qui ont construit notre spécialité telle qu’elle est devenue. Il avait une idée très précise de nos parcours et nous exécutions ses ordres ; à l’époque on ne discutait pas les ordres du chef … ou on discutait mais à la fin il avait gain de cause. Constat étonnant à notre époque de débats et de compromis, il avait pratiquement toujours vu juste. Nous ne pouvons ici que le remercier des trajectoires qu’il nous a imprimées.
Son enseignement allait au-delà de la médecine. Il incarnait une honnêteté sans faille, une rigueur dans la recherche, le respect des valeurs éthiques, l’entraide entre les médecins et bien sûr le travail et l’investissement dans les soins. Pour lui, l’équipe était plus importante que les individus qui la composent. Cette idée qui peut paraître assez naturelle aujourd’hui était loin d’être évidente dans les années 80, marquées par un individualisme médical qui persiste aujourd’hui. Ces qualités, qui pouvaient parfois passer pour de la rigidité intellectuelle, le faisait surnommer par certains chirurgiens le « Staline du rez-de-chaussée » (là où était la réanimation). En réalité, les chirurgiens étaient plutôt à l’aise avec cette posture qui leur donnait un cap clair mais sans compromis et la plupart avaient, nous croyons, une réelle affection pour lui. Ces valeurs ont marqué ses élèves et le contrat moral qu’il avait scellé en nous accordant sa confiance continue à diriger nos actions.
Il y a un domaine dans lequel nous n’avons pas respecté ses souhaits, c’est celui de la recherche scientifique. Il était passionné de nutrition artificielle et a orienté plusieurs d’entre nous dans cette voie. Nous avons presque tous bifurqué vers d’autres directions mais il respectait nos choix et comprenait que c’était notre espace de liberté complète.
Bien sûr, il a mérité de nombreuses distinctions. Professeur de classe exceptionnelle, Chevalier de l’Ordre National du Mérite en 1980, il était surtout respecté par ses pairs. Venir se présenter en se recommandant de lui ouvrait bien des portes et était un gage de qualité. Après sa retraite de l’hôpital, sa passion de la médecine l’avait amené à donner de nombreuses conférences pour l’Association des Amis du Patrimoine Médical de Marseille. Il aimait bien passer du temps dans sa maison en Lozère, environné d’un calme qui lui allait bien. Avec la disparition de ce Maître fondateur de l’anesthésie-réanimation Marseillaise, le « grand Georges » comme l’appelaient nos collègues Suisses, c’est une page de l’histoire de notre spécialité qui se tourne.
Nous exprimons à son fils, à sa belle-fille et à ses petits-enfants toute notre sympathie dans ces jours de deuil
Dr. Catherine Guidon Pr. Nicolas Bruder
