Mis en ligne le 17 Décembre 2002 et modifié le 16 Mars 2010
Archive : Communiqué

A l’occasion de l’émotion suscitée par l’accident survenu au Val de Grâce, des informations discordantes ont été publiées dans la presse « grand public » sur certaines données concernant l’anesthésie. La SFAR a donc souhaité mettre à la disposition de tous des renseignements fiables.

La consultation préanesthésique

La consultation préanesthésique est nécessaire avant tout acte programmé sous anesthésie. Elle doit être réalisée plusieurs jours à l’avance, par un médecin anesthésiste-réanimateur (Recommandations concernant la période préanesthésique, Décret du 5 décembre 1994).

Par plusieurs jours à l’avance, il faut entendre un temps utile pour pouvoir éventuellement apporter des modifications de traitement ou de programmation, prendre connaissance d’éventuelles investigations complémentaires, et permettre au patient de réfléchir à l’information fournie (Fiche d’information médicale aux patients sur l’anesthésie, Réflexions sur l’information et le consentement du patient en anesthésie-réanimation).

Souvent, ce délai est de l’ordre d’une semaine, mais peut être plus long : il convient alors de vérifier lors de la visite préanesthésique qu’il n’est pas survenu d’événement nouveau depuis la consultation.

La visite préanesthésique

La visite préanesthésique a lieu la veille de l’acte (en cas d’hospitalisation) ou le jour même (notamment pour les patients ambulatoires) dans les heures précédant l’acte. Elle vise à vérifier l’absence d’élément nouveau depuis la consultation, à prendre connaissance d’éventuels examens complémentaires. Elle vise également à rassurer psychologiquement le patient et obtenir son consentement final pour la technique envisagée.

Les curares en anesthésie en France

L’enquête « 3 jours d’anesthésie en France » de la SFAR a montré qu’il y avait environ 8 000 000 d’anesthésies en France. Plus des 3/4 sont des anesthésies générales, soit environ 6 200 000 par an. Parmi celles-ci, les curares sont utilisés dans 40% des cas, soit environ 2 500 000 par an (résultats à paraître). C’est pour l’anesthésie en chirurgie qu’ils sont le plus souvent utilisés (55 % des anesthésies générales). A titre d’exemple, au cours des cholécystectomies, l’anesthésie générale est utilisée dans pratiquement 100 % des cas et les curares dans 98 à 99 % des cas (résultats à paraître).

Les chocs allergiques en anesthésie

La fréquence des chocs allergiques vrais en anesthésie est estimée à 1 pour 6 à 10 000 anesthésies générales (Laxenaire 1993, Fisher 1993). Les chocs avec arrêt cardiaque (grade 4) correspondent à 1 choc allergique recensé sur 10, soit de l’ordre de 1 pour 100 000 anesthésies générales (résultats à paraître).

Le traitement repose toujours sur l’administration immédiate d’adrénaline, associée au remplissage vasculaire. La détection avant l’anesthésie d’une sensibilité aux curares se fait au moyen de tests cutanés, réalisés par des spécialistes : des prick-tests sont proposés chez les sujets ayant un antécédent évocateur de réaction allergique peranesthésique. Il n’existe pas sur le marché, français ou international, de dispositif commercialisé permettant, lors de la consultation préanesthésique, un dépistage simple dans une population à risque (tels les sujets atopiques) (Laxenaire 1996).

Les chocs allergiques aux curares

Les produits incriminés dans les chocs allergiques survenant durant l’anesthésie sont principalement : les curares (62 %), le latex (17 %), les antibiotiques (8 %). Parmi les curares, les produits les plus fréquemment en cause sont : le vécuronium (Norcuron® : 29 %), l’atracurium (Tracrium® : 24 %), le suxaméthonium (Célocurine® : 23 %). Chez plus de 70 % des patients allergiques à un curare, il existe une allergie croisée avec un ou plusieurs autres (Laxenaire 1997). Le nombre annuel de patients ayant reçu chaque produit est inconnu. Le risque relatif propre à chaque curare ne peut donc être déterminé avec précision.

Les accidents d’anesthésie

Les seuls chiffres fiables pour la France sont ceux de l’enquête INSERM de 1980 (Hatton 1983). Le taux de décès totalement liés à l’anesthésie était alors de 1/12 000, comparable à celui des pays de même niveau médical. Depuis cette époque, des « standards » d’anesthésie ont été adoptés dans la plupart de ces pays, du même type que ceux recommandés par la SFAR entre 1989 et 1990 (Recommandations concernant la période préanesthésique.Recommandations concernant la surveillance des patients en cours d’anesthésie. Recommandations concernant la surveillance et les soins postanesthésiques) et rendus réglementaires en 1994 (Décret du 5 décembre 1994).

Les taux actuellement publiés sont de 1 décès sur 20 000 anesthésies en Australie (Warden 1994), 3/550 000 en Grande Bretagne à partir de déclarations volontaires (Campling 1995). De fait, l’étude de taux aussi faibles nécessite de très larges enquêtes, de réalisation difficile.

Le Rapport du Haut Comité de la Santé Publique sur la Sécurité en Anesthésie, après avoir suggéré certaines mesures finalement adoptées par voie réglementaire, a proposé des mesures d’évaluation, qui sont en cours d’élaboration par la SFAR. La première étape indispensable était la détermination du nombre d’anesthésies (dénominateur) et est en cours de publication. Les projets en cours d’étude sont, d’une part l’étude des certificats de décès avec l’INSERM, d’autre part le recueil prospectif des événements indésirables et de l’activité d’un échantillon d’établissements volontaires.

Pour ce qui concerne plus spécifiquement les chocs anaphylactiques en rapport avec l’anesthésie, il existe une enquête nationale reposant également sur les déclarations volontaires (mcLaxenaire.nancy@invo.edu).


Références bibliographiques

L’anesthésie en France en 1996, résultats d’une enquête de la Société Française d’Anesthésie et de Réanimation. Premiers résultats. Le lettre de la SFAR n°20. Ann Fr Anesth Réanim 16 (supp6): 1-4, 1997

Recommandations concernant la période préanesthésique. Société Française d’Anesthésie et de Réanimation, septembre 1990

Recommandations concernant la surveillance des patients en cours d’anesthésie. Société Française d’Anesthésie et de Réanimation, juin 1989

Recommandations concernant la surveillance et les soins postanesthésiques. Société Française d’Anesthésie et de Réanimation, septembre 1990

Campling EA, Devlin HB, Hoile RW, LunnN JN. The report of the National Confidential Enquiry into perioperative deaths 1992/1993. (National CEPOD, London, 1995)

Fisher MM, Baldo BA. The incidence and clinical features of anaphylactic reactions during anaesthesia in Australia. Ann Fr Anesth Réanim 12: 97-104, 1993

Hatton F, Tiret L, Maujol L, N’Doye N, Vourc’h G, Desmonts JM, Otteni JC, Scherpereel P. Enquête épidémiologique sur les accidents d’anesthésie. Premiers résultats. Ann Fr Anesth Réanim 2: 331-86, 1983

Laxenaire MC, pour le Groupe national d’études épidémiologiques des réactions anaphylactoïdes peranesthésiques. Substances responsables des chocs anaphylactiques en cours d’anesthésie. Enquête multicentrique 1994-1996. Ann Fr Anesth Réanim 16 supt: R042, 1997

Laxenaire MC and the members of the Writing Committee. Drugs and other agents involved in anaphylactic shock occuring during anaesthesia. A French multicenter epidemiological inquiry. Ann Fr Anesth Réanim 12: 91-96, 1993

Laxenaire MC, Moneret-Vautrin DA, Guéant JL. Réactions allergiques au cours de l’anesthésie. pp 229-247 in Conférences d’actualisation. 38ème congrès national d’anesthésie et de réanimation. Elsevier, Paris 1996.

Warden JC, Borton CL, Horan BF. Mortality associated with anaesthesia in New South Wales, 1984-1990. Med J Aust 161: 585-593, 1994