Mis en ligne le 9 Juin 2008
Questions Fréquentes

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Pr Philippe Montravers
Hôpital Bichat- Claude Bernard PARIS

 

Question 1 – La réalisation des prélèvements peropératoires doit-elle retarder le début du traitement antibiotique ?

Question 2 – Quelle valeur attribuer à la culture des écoulements de drainages ouverts ?

Question 3 – Que penser des laparotomies  » blanches  » ?

Question 4 – Quelle durée de traitement pour une infection nosocomiale ou postopératoire ?

Question 5 – Faut-il prendre en compte les entérocoques dans le traitement antibiotique ?

Question 6 – Faut-il utiliser des aminosides ?

Question 7 – Quant faut-il prescrire un traitement antifongique ?

Question 8 – Quelle est la place des ré-interventions systématiques programmées ?

Question 9 – Quelle place reste-t-il dans le traitement pour les irrigations-lavage et les laparostomies ?

Question 10 – Quelle est la place des techniques de radiologie interventionnelle ?

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Question 1 – La réalisation des prélèvements peropératoires doit-elle retarder le début du traitement antibiotique ?

Les recommandations des conférences de consensus et d’experts est de ne pas différer le début du traitement antibiotique. Il est indispensable de réaliser des prélèvements lors de l’intervention. Le traitement antibiotique doit être débuté le plus rapidement possible dès la décision de reprise chirurgicale. Il n’y a aucun risque de  » négativer  » les prélèvements par cette dose initiale d’antibiotique. Par contre cette première dose d’antibiotique pourrait limiter les bactériémies postopératoires.

— Conférence de Consensus – Prise en charge des péritonites communautaires – Ann Fr Anesth Reanim 2001 ; 20 : 344s-472s
— Solomkin JS, Mazuski JE, Baron EJ, Sawyer RG, Nathens AB, DiPiro JT, et al. Guidelines for the selection of anti-infective agents for complicated intra-abdominal infections. Clin Infect Dis 2003 ; 37 : 997-1005
Mazuski JE, Sawyer RG, Nathens AB, Dipiro JT, Schein M, Kudsk KA, Yowler C, Therapeutic agents committee of the Surgical Infection Society. The surgical infection society guidelines on antimicrobial therapy for intra-abdominal infections : An executive summary. Surg Infect 2002 ; 3 : 161-173.
— Conférence d’experts : Association d’antibiotiques ou monothérapie en réanimation chirurgicale et en chirurgie. Ann Fr Anesth Réanim. 2000 ;19:fi 63-68.

Question 2 – Quelle valeur attribuer à la culture des écoulements de drainages ouverts ?

Il est inutile de mettre en culture les drainages ouverts car leurs résultats sont très difficiles à interpréter. Il est impossible de faire la part entre la flore cutanée, la flore de l’environnement et les germes issus du drainage proprement dit.

— Conference de Consensus – Prise en charge des péritonites communautaires – Ann Fr Anesth Reanim 2001 ; 20 : 344s-472s

Question 3 – Que penser des laparotomies  » blanches  » ?

La rapidité avec laquelle le diagnostic est porté et l’efficacité du traitement mis en œuvre conditionnent le pronostic. Une reprise chirurgicale « pour rien » vaut toujours mieux qu’un sepsis dépassé, opéré trop tardivement. De plus, l’attitude sera d’autant interventionniste que l’état clinique du patient sera plus grave. Pour Koperna, seule une décision de ré-exploration rapide au cours des 48 premières heures suivant le diagnostic est à même de diminuer la mortalité. Bohnen rapporte une mortalité de 35 % en cas de ré-intervention précoce (dans les 24 heures suivant le diagnostic) contre 65% en cas de ré-intervention plus tardive. Cette attitude interventionniste doit être mise en balance avec le risque de lésions digestives iatrogènes qui augmente à chaque ré-intervention et avec le délai écoulé depuis l’intervention précédente.

— Bohnen J, Boulanger M, Meakins J, McLean P. Prognosis in generalized peritonitis : relation to cause and risk factors. Arch Surg 1983 ; 118:285-290.
— Koperna T, Schulz F. Prognosis and treatment of peritonitis. Arch Surg 1996 ; 131:180-186.
— Anderson ID, Fearon KC, Grant IS. Laparotomy for abdominal sepsis in the critically ill. Br J Surg 1996 ; 83:535-539.

Question 4 – Quelle durée de traitement pour une infection nosocomiale ou postopératoire ?

La durée du traitement dans le contexte d’une infection nosocomiale ou postopératoire n’est pas établie. La durée de traitement d’une infection postopératoire n’est probablement pas la même en cas de reprise précoce chez un patient sans défaillance viscérale que chez un sujet âgé, réopéré tardivement en défaillance poly-viscérale. Cependant, les travaux sur ce thème manquent. Le traitement est en général poursuivi 7 à 15 jours selon la sévérité initiale et la qualité du geste chirurgical. Un traitement plus prolongé ne sert à rien. La reprise du transit digestif, le retour d’une apyrexie et la baisse de la leucocytose sont les trois éléments généralement retenus pour arrêter le traitement.

— Bartlett JG. Intra-abdominal sepsis. Med Clin North Am, 1995,79:599-617
— Solomkin JS, Mazuski JE, Baron EJ, Sawyer RG, Nathens AB, DiPiro JT, et al. Guidelines for the selection of anti-infective agents for complicated intra-abdominal infections. Clin Infect Dis 2003 ; 37 : 997-1005
— Mazuski JE, Sawyer RG, Nathens AB, Dipiro JT, Schein M, Kudsk KA, Yowler C, Therapeutic agents committee of the Surgical Infection Society. The surgical infection society guidelines on antimicrobial therapy for intra-abdominal infections : An executive summary. Surg Infect 2002 ; 3 : 161-173.
— Conférence d’experts : Association d’antibiotiques ou monothérapie en réanimation chirurgicale et en chirurgie. Ann Fr Anesth Réanim. 2000 ;19:fi 63-68.

Question 5 – Faut-il prendre en compte les entérocoques dans le traitement antibiotique ?

Peu de données sont disponibles dans les infections nosocomiales ou postopératoires. Quelques études suggèrent qu’un traitement antibiotique ne prenant pas l’entérocoque en compte pourrait être utilisé avec succès dans les infections plurimicrobiennes [1]. Néanmoins, des échecs thérapeutiques et des bactériémies à entérocoques dont l’origine était le site opératoire ont été rapportés lors de traitements négligeant ce germe [2,3]. Dans les infections postopératoires, Koperna rapporte que 94 % des patients décédés avaient reçu un traitement antibiotique inadapté [4]. Un traitement initial ne prenant pas en compte tous les germes se traduit par une morbidité accrue et une mortalité doublée en comparaison avec une antibiothérapie adaptée [5].
Les entérocoques posent le problème de bactéries saprophytes du tube digestif, peu sensibles aux antibiotiques, dont le pouvoir pathogène spontané est modeste mais qui sont retrouvées très fréquemment dans les prélèvements des péritonites postopératoires [5]. Ces germes se comporteraient donc comme des facteurs de morbidité accrue [3], et pourraient dans les infections postopératoires être un facteur de mortalité [6,7].
En l’absence de données fiables dans la littérature, il recommandé de prendre en compte ces germes dans le traitement initial des patients les plus graves (sujet fragile, défaillance polyviscérale, choc septique …), en cas d’antibiothérapie préalable, en cas d’infection postopératoire [8,9,10].

[1] Hopkins JA, Lee JC, Wilson SE. Susceptibility of intra-abdominal isolates at operation : a predictor of postoperative infection. Am Surg, 1993,59:791-6
[2] Weigelt JA, Easley SM, Thal ER, Palmer LD, Newman VS. Abdominal surgical wound infection is lowered with improved perioperative enterococcus and bacteroides therapy. J Trauma 1993 ; 34 : 579-84
[3] Burnett RJ, Haverstock DC, Dellinger EP, et al. Definition of the role of enterococcus in intraabdominal infection : analysis of a prospective randomized trial. Surgery, 1995,118:716-21
[4] Koperna T, Schulz F. Prognosis and treatment of peritonitis. Arch Surg 1996 ; 131 : 180-186
[5] Montravers P, Gauzit R, Muller C, Marmuse JP, Fichelle A, Desmonts JM. Emergence of antibiotic-resistant bacteria in cases of peritonitis after intraabdominal surgery affects the efficacy of empirical antimicrobial therapy. Clin Infect Dis 1996 ; 23 : 486-494
[6] Sotto A, Lefrant JY, Fabbro-Peray P, Muller L, Tafuri J, Navarro F, Prudhomme M, De La Coussaye JE. Evaluation of antimicrobial therapy of 120 consecutive patients with secondary peritonitis. J Antimicrob Chemother, 2002 ; 50 : 569-576
[7] Sitges-Serra A, Lopez MJ, Girvent M, Amirall S, sancho JJ. Enterococcal infection after treatment of complicated intra-abdominal sepsis. Br J Surg 2002,89 :361-367
[8] Solomkin JS, Mazuski JE, Baron EJ, Sawyer RG, Nathens AB, DiPiro JT, et al. Guidelines for the selection of anti-infective agents for complicated intra-abdominal infections. Clin Infect Dis 2003 ; 37 : 997-1005
[9] Conférence d’experts : Association d’antibiotiques ou monothérapie en réanimation chirurgicale et en chirurgie. Ann Fr Anesth Réanim. 2000 ;19:fi 63-8.
[10] Montravers P, Gauzit R, Pourriat JL. Péritonites. In : Antibiothérapie probabiliste des états septiques graves. Conférence d’expert. Collection de la SFAR. Elsevier Ed : 199-205 ; 2004

Question 6 – Faut-il utiliser des aminosides ?

Les aminosides sont une classe antibiotique très utilisée en France. Les indications habituellement retenues sont les situations cliniques graves ou une suspicion de germe résistant aux ß-lactamines. L’amikacine présente le taux de résistance le plus faible vis à vis des bacilles à Gram négatif hospitaliers et la gentamicine est l’agent le plus efficace vis à vis des germes à Gram positif comme les entérocoques.
Le traitement est initié pour une brève durée (<3 jours), en phase probabiliste, en administrant ces agents à dose satisfaisante et en surveillant leurs concentrations plasmatiques. Du fait du développement d’insuffisances rénales rapportées dans des publications anciennes, ces agents gardent une mauvaise réputation probablement usurpée. Un travail de Dupont et coll associant la pipéracilline+tazobactam à l’amikacine ne montre aucun bénéfice de l’adjonction des aminosides avec cet agent dans des infections ou nosocomiales. Dans cette publication, la fréquence des insuffisances rénales était équivalente chez les patients recevant des aminosides et ceux n’en recevant pas.

— Solomkin JS, Mazuski JE, Baron EJ, Sawyer RG, Nathens AB, DiPiro JT, et al. Guidelines for the selection of anti-infective agents for complicated intra-abdominal infections. Clin Infect Dis 2003 ; 37 : 997-1005
— Conférence d’experts : Association d’antibiotiques ou monothérapie en réanimation chirurgicale et en chirurgie. Ann Fr Anesth Réanim. 2000 ;19:fi 63-68.
— Dupont H, Carbon C, Carlet J. Monotherapy with a broad-spectrum beta-lactam is as effective as its combination with an aminoglycoside in treatment of severe generalized peritonitis : a multicenter randomized controlled trial. The Severe Generalized Peritonitis Study Group. Antimicrob Agents Chemother, 2000,44:2028-2033.
— Montravers P, Gauzit R, Pourriat JL. Péritonites. In : Antibiothérapie probabiliste des états septiques graves. Conférence d’expert. Collection de la SFAR. Elsevier Ed : 199-205 ; 2004

Question 7 – Quant faut-il prescrire un traitement antifongique ?

Les levures, principalement Candida, sont isolées dans près de 20% des prélèvements des infections postopératoires, préférentiellement en cas de localisation sus-mésocolique [1-3].
Toute la difficulté dans ce contexte repose sur l’interprétation des résultats et l’identification du rôle pathogène de ces agents. Il paraît prudent de parler d’infections intra-abdominales avec prélèvements positifs à levures plutôt que de péritonite à candida. En effet, les éléments cliniques ou biologiques manquent pour différencier une authentique infection d’une colonisation à levures. Aussi, le terme d’infection est le plus souvent abusif et à interpréter avec prudence. Une surmortalité est observée en cas de prélèvements positifs à levures au cours des infections intra-abdominales nosocomiales mais pas au cours des infections communautaires [3]. Il pourrait donc être recommandé de traiter systématiquement les prélèvements positifs à levures au cours des infections nosocomiales au titre du principe de précaution.
Les recommandations des consensus ne sont pas claires [4,5]. Certains auteurs dans des travaux anciens, comme Solomkin [, recommandent un traitement systématique antifongique dès la reprise opératoire de manière à éviter la dissémination de l’infection [6]. D’autres auteurs tels que Calandra ne recommandent ce traitement qu’en cas d’infection monomicrobienne à levure ou en cas d’infection mixte avec persistance de signes d’infection après traitement chirurgical adéquat et traitement antibactérien adapté [7]. Une solution pourrait être de débuter un traitement probabiliste chez les sujets dont l’examen direct du liquide péritonéal retrouve la présence de levures, témoignant d’un inoculum important (8,9). Dupont a proposé un score permettant de prédire la présence de levures dans les prélèvements opératoires de sujets opérés de péritonite. Les critères simples (score APACHE II >17, insuffisance respiratoire aiguë, localisation gastroduodénale de la lésion, présence de candida à l’examen direct) permettent de classer les patients en situation à risque de levure et donc de débuter rapidement un traitement antifongique (9). La présence d’au moins trois de ces facteurs donne une sensibilité de 84% et une specificité de 50% et avec quatre facteurs une sensibilité de 100% tandis que l’absence de ces facteurs donne une spécificité de 100%.
Dans l’état actuel des connaissances, il n’est pas établi qu’un traitement antifongique retardé soit de plus mauvais pronostic. Néanmoins, par extrapolation aux infections bactériennes, cette hypothèse est probable [4,5].

[1] Montravers P, Gauzit R, Muller C, Marmuse JP, Fichelle A, Desmonts JM. Emergence of antibiotic-resistant bacteria in cases of peritonitis after intraabdominal surgery affects the efficacy of empirical antimicrobial therapy. Clin Infect Dis 1996 ; 23 : 486-494
[2] Dupont H, Paugam-Burtz C, Muller-Serieys C, Fierobe L, Chosidow D, Marmuse JP, et al. Predictive factors of mortality due to polymicrobial peritonitis with Candida isolation in peritoneal fluid in critically ill patients. Arch Surg 2002 ; 137 : 1341-1346
[3] Montravers P, Dupont H, Gauzit R, Veber B, Auboyer C, Blin P, Hennequin C, Martin C. Candida as a risk factor for mortality in peritonitis. Crit Care Med 2006 ;34 :646-652
[4] Solomkin JS, Mazuski JE, Baron EJ, Sawyer RG, Nathens AB, DiPiro JT, et al. Guidelines for the selection of anti-infective agents for complicated intra-abdominal infections. Clin Infect Dis 2003 ; 37 : 997-1005
[5] Mazuski JE, Sawyer RG, Nathens AB, Dipiro JT, Schein M, Kudsk KA, Yowler C, Therapeutic agents committee of the Surgical Infection Society. The surgical infection society guidelines on antimicrobial therapy for intra-abdominal infections : An executive summary. Surg Infect 2002 ; 3 : 161-173.
[6] Solomkin JS, Flohr AB, Quie PG, Simmons RL. The role of Candida in intraperitoneal infections. Surgery, 1980,88:524-30.
[7] Calandra T, Bille J, Schneider R, et al. Clinical significance of Candida isolated from peritoneum in surgical patients. Lancet, 1989,ii:1437-1440.
[8] Sandven P, Qvist H, Skovlund E, et al : Significance of Candida recovered from intraoperative specimens in patients with intra-abdominal perforations. Crit Care Med 2002 ;30:541-547
[9] Dupont H, Bourichon A, Paugam-Burtz C, Mantz J, Desmonts JM. Can yeast isolation in peritoneal fluid be predictive in intensive care unit patients with peritonitis ? Crit Care Med 2003 ; 31 : 752-757

Question 8 – Quelle est la place des ré-interventions systématiques programmées ?

Il n’existe aucun moyen de drainer efficacement toute la cavité péritonéale. Ceci explique la fréquence des foyers résiduels et des reprises itératives chez 30 à 50 % des patients. La pratique de ré-interventions  » à la demande  » n’apporte pas totalement satisfaction, du fait du retard à la reprise parfois observé chez des patients complexes.
Des ré-interventions systématiques programmées toutes les 24-48 heures ont été proposées, jusqu’à obtention d’une cavité péritonéale macroscopiquement propre. Cette technique est intéressante en cas d’éradication incomplète des foyers nécrotiques ou infectieux, en cas de doute sur la viabilité du tube digestif lors de la ré-intervention initiale, surtout chez les patients les plus graves. Ainsi, Wittmann a montré que, chez les patients en défaillance poly-viscérale, le décès était observé dans 31% des cas lors de ré-interventions systématiques programmées versus 60 % de décès en cas de ré-intervention à la demande. Cependant, ces indications ne concernent que 10 % des patients.
Dans un travail récent, Van Ruler a comparé des reprises chirurgicales à la demande et des ré-interventions programmées. Les auteurs n’ont pas montré de différence de mortalité ni de morbidité chez les patients qui avaient des reprises à la demande.

— Wittmann DH. Bansal N, Bergstein JM, Wallace JR, Wittmann MM, Aprahamian C. Staged abdominal repair compares favorably with conventional operative therapy for intra-abdominal infections when adjusting for prognostic factors with a logistic model. Theor Surg 1994 ; 9:201-5.
— Koperna T, Schulz F. Prognosis and treatment of peritonitis. Arch Surg 1996 ; 131:180-6.
— Hinsdale JG, Jaffe BM. Re-operation for intra-abdominal sepsis : Indications and results in modern critical care setting. Ann Surg 1984 ; 199:31-6
— Van Ruler O, Mahler CW, Boe KR, Reuland EA, Gooszen HG, Opmeer BC, de Graaf PW, Gerhards MF, Steller Ep, van Till JWO, de Borgie CJAM, Retsma JB, Boermeester MA, and the Dutch Peritonitis Study Group. Comparison of on-demand vs planned relaparotomy strategy in patients with severe peritonitis. JAMA, 2007 :298 :865-873

Question 9 – Quelle place reste-t-il dans le traitement pour les irrigations-lavage et les laparostomies ?

L’irrigation-lavage post-opératoire continue a fait l’objet de nombreuses études, mais n’a pas fait la preuve de son efficacité. Cette technique est très contraignante. Ainsi, ces systèmes ont été progressivement abandonnés pour des motifs anatomiques (apparition en 24-48 heures de circuits préférentiels à l’origine de séquestres potentiellement septiques) et pour des motifs techniques (étanchéité difficile à obtenir, obstruction du drainage…).
Pour favoriser le drainage de la cavité abdominale, et conserver le bénéfice des ré-interventions itératives, certains auteurs ont proposé de ne pas fermer la paroi abdominale, réalisant des laparostomies. Les difficultés techniques (étanchéité), le risque majeur de fistule digestive sur des anses grêles fragilisées et l’absence de supériorité face à des ré-interventions à la demande ont conduit à l’abandon de cette technique. Actuellement, seule l’impossibilité d’une fermeture cutanée impose une laparostomie.

— Schein M, Saadia R. The open management of the septic abdomen. Surg Gynecol Obst 1986 ; 163:567-592
— Christou NV, Barie PS, Dellinger EP, Waymack JP, Stone HH. Surgical Infection Society intra-abdominal infection study. Prospective evaluation of management techniques and outcome. Arch Surg 1993 ; 128:193-198
— Dazza F.E. Péritonites graves en réanimation : modalités du traitement chirurgical. In : Réanimation et Médecine d’Urgence. Paris : Expansion Scientifique Française, 1985 ; 271-286

Question 10 – Quelle est la place des techniques de radiologie interventionnelle ?

En cas de lésions cloisonnées (abcès), l’alternative à la ré-intervention est le drainage percutané. Les drainages peuvent être guidés par échographie ou par tomodensitométrie [1-3]. Cependant, seule la chirurgie permet d’éliminer la présence de lésions associées. En effet, la présence d’un abcès n’élimine pas celle d’une péritonite persistante ou d’un lâchage de suture que le plus souvent seule la chirurgie pourra traiter. Aussi, un lâchage d’anastomose satellite d’un abcès est un facteur d’échec du drainage. En pratique, 30 % des abcès sont traités par drainage seul [1,3]. Parallèlement à la mise en place du drain, une irrigation-drainage des abcès et une antibiothérapie dirigée contre les germes isolés sont effectuées. Une surveillance clinique et tomodensitométrique régulière des abcès est recommandée. L’amélioration clinique doit être rapide et nette au décours du drainage. Au moindre doute ou en cas d’aggravation clinique sous drainage, une ré-évaluation est nécessaire avec indication éventuelle à un drainage chirurgical ou à un nouveau drainage percutané. Les complications ne sont pas inhabituelles (fistule digestive, drainage insuffisant, déplacement du drain…) [1-3]. Une chirurgie de complément est proposée en cas d’aggravation clinique (10 % des cas) ou d’échec du drainage (10 à 20 % des patients).

[1] Ayerza HA. Abcès intra-abdominaux. A propos de 530 cas. Chirurgie 1994-1995 ; 120 : 551-555
[2] McLean TR, Simmons K, Svensson LG. Management of postoperative intra-abdominal abscesses by routine percutaneous drainage. Surg Gynecol Obstet 1993 ; 176:167-171
[3] Shuler FW, Newman CN, Angood PB, Tucker JG, Lucas GW. Nonoperative management for intra-abdominal abscesses. Am Surg 1996 ; 62:218-222

Pr Philippe Montravers